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Hebraizantes portugueses de San Juan de Luz en 1619

Wentworth Webster







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Procès verbal fait par Me Echepare, Greffier de Baïonne sur le sacrilege commis par une Portugaise, aiant craché le St Sacrement dans un mouchoir, dont elle fut brulée sur la place publique de St Jean de Luz. -Original en el archivo municipal de San Juan de Luz, números 283, 39.

Procès verbal fait par Me Ech... Greffier de Baïonne sur le sacrilege commis par une Portugaise aiant craché le St Sacrement dans un mouchoir, dont elle fut brulée sur la place publique de St Jean de Luz nos 283. 39 (1619).

Nous Michel Doihazard chanoine Théologal de l'Église cathédrale de nostre dame a Baïonne et Vicaire général et official du présent diocèze de Baïonne, savoir faisons à tous ceux qui cette présente liront que désirant entretenir la discipline éclésiastique au dit diocèse et empêcher qu'aucun abus ne se glissait en... d'ycelle; nous aurions ordonné le dernier jour du mois de février dernier passé mil six cent dix neuf, que tous Vicaires et autres prêtres qui se mesleraient d'administrer les saints sacrements et de prêcher la parole de Dieu, nous feraient apparoir de leur charge et lettres d'approbation, comme aussi tous prêtres étrangers de la licence et permission qu'ils avaient de célébrer messe au dict Diocèse. -Laquelle ordonnance satisfaisants, maître Jean de Lasson, Pierre Lissardy prêtres du lieu de St Jean de Luz et Manuel de Sanfus prêtre Portugais de nation deveinrent nous trouver le seixième jour du mois de mars aussi dernier, avec les quels nous entretenants des raisons de la retraite du dict Emanuel de Sanfus et de deux autres prêtres aussi Portugais au dict St Jean de Luz, nous leur aurions remontré que nous avions sujet et doute et d'avoir quelque sinistre opinion de leur vie et mœurs ou de leur réligion puis qu'ils avaient quitté leur pays natal et s'étaient

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retirés en un lieu où ils n'estaient pas beaucoup employés n'y ne pouvaient espérer aulcun advencement. Le dict Sanfus nous aurait reparti que pour lui à la vérité, il s'estait absenté de sa patrie pour quelques accusations et pour éviter la rigueur de l'Inquisition; néantmoins qu'il avait ses lettres testimoniales de son supérieur qui faisaint foi de ses vie et mœurs, et que depuis quil s'était retiré au dict St Jean de Luz, il avait tâché de se comporter en bon éclesiastique nous suppliant de lui proroger sa licence, qu'il avait sa mère à St Jean de Luz laquelle il ne pouvait [aucunement] quitter.

Sur ces propos les dicts de Lasson et Lissardy prennant la parolle pour le dict Sanfus nous auraint dict qu'y celui Sanfus ne tesmoignait aucunement par ses actions qu'il fûst aultre que bon chrestien et catholique, qu'il vivait fort réligieusement et avec toute sorte de décense, même qu'il ne hantait les auttres Portugais parmi les quels il n'estait pas aussi trop bien venu. Adjoustant qu'il y avait un aultre Prestre Portugais nommé Don Antonio, lequel quelques jours auparavant avait satisfaict à nostre dicte ordonnance, du quel ils n'avaint pas d'occasion d'avoir si bonne opinion pour autant qu'il estait d'ordinaire parmi les aultres Portugais et cheri et aimé d'eux grandement, mesme que ceux d'entre eux qui voulaint faire leur dévotion ne s'adressaint a aultre prestre qu'à luy. Qu'au reste la pluspart des dicts Portugais chaumaint notoirement les jours de sapmedi, ne gardaint pas les féttes commandées par l'église, n'y en icelles n'entendaint par la messe que fort rarement. -En sorte qu'en apparence mesme... ils ne se sousciaint pas beaucoup de paraistre chrestiens et catholiques et que le monde les pouvait prendre plustôt pour Juifs ou de quelque aultre sorte, que de notre religion.

Au moyen de quoi les habitants du dict lieu en avaint conçu desjà des opinions sinistres, et les plus zelés les avaint quasi en horreur, particulièrement pour un certain bruit sourd qui courait au dict lieu que ces gens avaint esté quantes fois surpris en faisant des indignités au crucifix en célébrant des cérémonies Judaïques.

De quoi bien ébahis et déplaisants aurions spontanement enjoint aux dicts de Lasson et Lissardy de prendre garde soigneusement

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aux actions et comportements des dicts Portugais en l'exercice de la religion chrestienne et surtout de veiller particulièrement sur le dict Don Antonio qui les soulait ouir en confession.

Et adressant le dix huitième du mesme mois de Mars le recteur du dict St Jean de Luz nous aurait escrit que le dict Lissardy avait le même jour surpris une femme Portugaise cachant la sainte hostie qu'elle avait tiré de sa bouche dans son mouchoir soudain qu'elle l'avait reçue, et que les Bayfe et Jurats du dict lieu en avaient donné advis aux officiers de Labourd comme lui nous donnait aussi, nous priant de donner les ordres que nous adviserions. Et à l'instant nous aurions communiqué la lettre du dict recteur aux officiers de la dicte ville de Baïonne. Que le lendemain qui estait le dixneufvième du dict mois nous serions partis vers le dict St Jean de Luz en compagnie de Mrs Martin de Cruchette lieutenant particulier au siège de la dicte ville et Laurens d'Arcangos procureur du roi au baillage du dict Labourd.

Et estants prest du dict Sainct Jean de Luz aurions rencontré maistre André de la Lande procureur du roi de la dicte Ville qui venait du dict lieu, le quel avait rebroussé chemin, nous aurait representé que passant par la place du dict lieu il y aurait trouvé force gens mutinés et ralliés ensemble contre les dicts Portugais faisant des préparatifs pour brusler la dicte Portugaise et protestants qu'ils ne souffriraint qu'une si excecrable mechanceté demeurast impunie, criants à haulte voix qu'ils auraint paour que Dieu les abismat si elle eschappait de leurs mains.

Et estonné d'une telle émotion et désirant empescher que ce peuple ne fict aucune entreprise n'y violence contre la personne de la dicte Portugaise, il les aurait priés de se retirer et se departir de leurs desseins, leur promettant qu'il y donnerait tel ordre que la justice lui ferait le proçès promptement et sans l'oster de leur pouvoir.

Et que le dict Baïfe qui tâchait aussi par tous moyens d'arrester cette fureur les avait assurés pour les mieux appaiser que pourveu qu'ils le voulussent assister il n'y aurait homme qui la leur tirast des mains, que ces remontrances les aurait retenus et se retirants de la dicte place et priant tant le dict procureur du

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roi que le dict Baïfe d'y tenir la main ils auraint promis d'attendre le cours de la justice.

Estants arrivés au dict St Jean de Luz environ l'heure de midy aurions prins logis chez la dame d'Arguibel où les dicts recteur, Baïfe et Jurats nous aurions dict d'estre grandement aises de nostre arrivée s'assurants que notre présence et auctorité causerait quelque bon ordre en cette affaire. -Une heure après voulant avant toute... et voir le mouschoir où la saincte hostie estait gardée accompagnés des dicts officiers du roi, Baïfe et Jurats, recteur et plusieurs autres, nous nous serions transportés en l'Eglise du dict lieu où aurions faict tirer du tabernacle le dict mouschoir, et les cierges allumés et nous estant tres tous à genoulx le dict recteur l'aurait exhibé par devant nous et toute l'assistance, chacun y aurait recognu les espèces sacrées repliées à demy alterées sans aucun meslange de crachat se tenant par les extremités bien peu au linge. En sorte qu'à la voir on pouvait juger que c'était une petite hostie qui après avoir esté un peu mouillée avait esté enveloppée dans du linge.

Ce faict, le dict mouschoir aurait été remis en mesme estat dans le dict tabernacle, et sortants de la dicte Eglise avec délibération d'informer amplement du procès, Une grande troupe d'hommes tous esmeus nous auraint abordés au cimetière de la dicte eglise et nous auraint répresentés que la cognoissance de ce crime nous appartenait particulièrement parce que c'estait une injure et offense faicte contre l'honneur de Dieu et religion chrestienne. Qu'au reste ils estaint résolus de ne laisser sortir hors du dict lieu la prisonnière; qu'elle ne se pourrait par adventure sauver par corruption, par faveur et par les longueurs et formalités de Justice. Qu'eux mesmes avaint mis entre les mains de la justice des meurtriers et aultres criminels et qu'ils n'en avaint point aucune punition, qu'ils avaint à passer en Espagne et qu'on les y descouvrait, si cette detestable s'eschappait sans souffrir la peine qu'elle avait merité. Que l'excès estait si manifeste et notoire à un chacun qu'il n'estait pas besoing d'y rapporter aucune formalité de Justice et qu'il ne restait qu'à faire l'exécution sur le champ.

Après tels et semblables propos qu'ils nous tindrent avec une extrême passion, leur aurions resparti que nous remerçions grandement

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Dieu du ressentiment qu'ils avaint de l'injure et outrage faict au corps precieux de Jesus-christ, que leur zèle, vive foi et la punition qu'ils s'y requiroint [ne] pouvaint être que fort agréables, que nous nous estions aussi transportés sur les lieux avec mesme zèle et affection pour en prendre congnoissance; Neantmoings que Dieu qui avait establi la justice, il voulait aussi qu'on la rendict suivant les formes qu'elle avait ordonné pour cet effect que chacun de nous pouvait delinquer et tomber en accident et que dans ce cas nous vouldrions que sans précipitation et suivant les formalités ordinaires l'on procédast contre nous.

Pendant ces discours le dict lieutenant particulier s'approcha de nous, le quel fict entendre au mesme peuple, leur parlant en français, que pour le zèle et la querelle de Dieu poussé comme eux et par l'exéccrable sacrilège de leur prisonnière il se serait transporté sur les lieux pour en informer et qu'après on la pourrait juger promptemeent sans l'amener ailleurs les exhortants d'avoir cependant patience et de se garder de faire aucune violence, et quoi ils auraint volontiers presté l'aureille et déclairants qu'ils en demeureraint satisfaits près le dict lieutenant particulier d'en faire prompte et exacte justice.

Et soudain nous nous serions acheminés vers le dict logis d'Arguibel et en y celui aurions commencé, le dict lieutenant particulier et nous séparément avec nos greffiers a ouyr les tesmoings, et premièrement aurions procédé a l'audition du dict Lissardy le quel aurait déposé que le jour précédent dixhuitiesme du dict mois à l'heure de onze heures après la messe estant en un confessional au bout de la table où l'on a accoustumé de donner à communier, en escoutant en confession une femme du dict lieu, aurait apperçu comme le dict Don antonio avec l'assistance d'un Portugais qui portait un flambeau donnait à communier à plusieurs Portugaises qui estaint rangées en la dicte table estant toutes affublées de leurs robbes et prennant garde à la contenance et respect qu'elles portaint an sainct sacrement, pour autant que leur dévotion luy estait suspecte, il lui aurait semblé que les premières qui communiaint portaint quant et quant la main á la bouche. Ce qui lui donna occasion de les regarder plus attentivement, sans néantmoings faire semblant jusqu'à et que la

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dernière et celle qui luy estait la plus proche eut communié. Laquelle aussitôt qu'elle eut reçu la saincte hostie en la bouche aurait jesté un clin d'œil vers iceluy Lissardy, et puis bellement et à la dérobée s'estant un peu plus couverte le visage porté la main à la bouche et de la bouche en bas vers le costé.

Qu'en mesme temps il accourust vers elle et lui saisit le bras lui disant qu'elle lui monstrast ce qu'elle cachait sous sa robbe, d'où lui aiant tiré en haut la main, il aurait trouvé qu'elle cachait un mouschoir sous sa cotte, le quel il aurait print et trouvé en y celui la saincte hostie freschement humectée et repliée. De quoi tout estonné et hors de soy se serait escrié contre la dicte Portugaise, et lors le dict Don Antonio ou le dict Portugais qui portait le flambeau lui aurait dict ces paroles, senor licenciado, esso es poca cosa; no diga nada porque no aga escandalo. Vers les quels dressant ces paroles, comment me dites vous leur aurait-il dict, c'est peu de chose? je l'ai surprinst cachant le sainct sacrement dans le mouschoir. Que lors le dict Don antonio se serait aussi approché de la dicte Portugaise et lui aurait dict fort injures, et que trois ou quatre femmes de la Paroisse se seraint aussi mises à eux contre-elle, Qui aurait esté par après mise entre les mains des Sieurs Baïfe et Jurats. Qu'à l'heure mesme il remit le dict mouschoir en mesme état dans le dict tabernacle. -La déposition du quel Lissardy est plus amplement estendue en son audition.

Ce faict, nous aurions ouy le dict Don Antonio de Faria le quel nous aurait déclaré que la dict jour dixhuictième du dict mois de Mars aiant vacqué toute la matinée à ouyr en confession plusieurs femmes de sa nation, depuis environ l'heure d'onze leur aurait administré le sainct sacrement de l'autel; un certain homme l'ittere de la mesme nation nommé Henricus Fernandus tenant un cierge allumé en la main, et qu'après qu'elle aurait communié comme il lui portait l'ablution, le dict de Lissardy se serait levé de son confessional et aurait prins le mouschoir à une des dictes Portugaises qui était près du dict confessional, et quant et quant se serait mis à crier qu'icelle Portugaise avait craché le sainct sacrement dans le dict mouschoir. Pourquoi le dict Henricus l'aurait prié de n'en faire pas de bruit pour éviter

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le scandale. Et le dict Don Antonio s'estant alors approché du dict Lissardy il aurait veu la saincte hostie dans le mouschoir qu'il tenait entre les mains, tout emeu par la méchanceté de la dicte Portugaise se serait rué contre icelle, et lui aurait dict force injures l'appelant Juive, ennemie de Dieu, maudite, le deshonneur de sa nation mesme, qu'il l'eust battue si par quelques femmes Basques il n'en eust esté destourné. Que la dicte Portugaise s'excuserait cependant de son faict disant que le diable l'avait tentée, qu'elle estait folle et hors d'elle mesme et ne savait ce qu'elle avait faict.

Après le dict Don Antonio aurait esté ouys quelques femmes qui se trouvarent en la dicte Eglise lors du dict accident, les quelles auraint dict avoir veu le dict Lissardy fouillant la dicte Portugaise après qu'elle eust communié et que luy ayant prins le mouschoir, il s'escria tout transporté et hors de soy, disant qu'elle voulait cacher le sainct sacrement, au cry du quel elles ayant accouru auraint veu la saincte hostie dans le dict mouschoir, et que pendant que l'on estait après la dicte Portugaise la menassant et luy reprochant sa méchanceté toutes ses compagnes s'enfuirent de la dicte Eglise, qu'elle s'en voulait aussy aller, mais qu'elle y fust aussy arrestée et enfermée dans la sacristie de la dicte Eglise, et bientôst après remise entre les mains des ditts Baïfe et Jurats.

Et advenant l'heure de quatre heures nous nous acheminasmes vers la prison du dict lieu qui sont près du cimetière de la dicte eglise d'où la Portugaise fust tirée et mise par les dicts Baïfe entre les mains des dicts officiers de Baïonne et de Labourd, les quels aux fins de mieux éviter la rage et tumulte du peuple la feirent conduire en la sacristie de la dicte eglise où le Lieutenant particulier proceda à son audition, où nous assistants aussy avec les autres susdicts officiers.

Et environ l'heure de cinq heures le dict lieutenant particulier aurait eu advis que le sieur de Pausa estait arrivé au dict lieu et qu'il désirait parler à luy, occasion que le dict Lieutenant particulier serait sorti à l'instant de la dicte sacristie, qu'il fut cause que nous aurions reprins la dicte Portugaise por luy faire certains interrogatoires que nous jugeasmes estre apropos touschant

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la foy et religion chrestienne, la quelle après nous avoir dict, qu'elle avait nom Cathrine de Farandea, qu'elle estait veuve et agée de cinquante ans où environ, natisve de la ville de Francose en Portugal habituée despuis un mois ou environ au dict lieu et professant depuis son enfance la religion chrestienne et catholique nous aurait respondu que s'estant présentée à la communion en compagnie d'autres de sa nation, elle auroit craché la saincte hostie dans son mouschoir qui luy fust saisy incontinant par un prestre et que le diable qu'elle nommait el pecado lui avait faict venir une toux qui la pressa si fort qu'elle fust contraincte de la cracher ainsy.

Et interrogée ce qu'elle en eust faict, nous dict premièrement qu'elle savait pas ce qu'elle en eust faict et adjouta du depuis qu'estant de retour au logis elle l'eust reprinse après l'avoir lavée avec de l'eaue déclarant au reste qu'elle s'estait confessée au dict Don antonio et qu'elle ne savait si ses compagnes en auraint faict de mesme qu'elle ny si elles prindrent garde à son action.

Comme nous eusmes achevé de prendre son audition, le dict Lieutenant particulier rentra dans la dicte sacristie avec maistre Israel de Romutel advocat au siège de Baïonne et continua de prendre la dicte audition à la chandelle jusqu'à l'heure de six à sept heures, sur la quelle heure faisant ja obscur il se serait levé un grand bruit et tumulte dans la dicte eglise qui nous aurait meu à sortir de la dicte sacristie pour en savoir la subjet et empêcher qu'il ne sy commist aucunes irrévérences, et aurions soudain apperçu tout l'enclos de l'Eglise rempli de monde contestants les uns avec les autres à haute voix et confusément sur le sacrilège, commis par cette malheureuse, et estonné de cette inopinée émotion et ayant demandé la cause au dict curé qui était présent en langage français, un grand nombre de ce peuple nous aurait investy et interrompant notre discours nous auraint dict brusquement que nous devions parler basque, usant de ces formes, nous sommes tous basques, nous avons intérest d'entendre ce que vous dictes. -S'enquerants de nous confusément et peslemesle la vue où avions laissé la prisonnière, si on pretendait l'amener à Baïonne, si on avait achevé de l'ouyr, si elle avait confessé la verité. -Les autres criants qu'ils n'auraint jamais le courage

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d'implorer l'aide de Dieu parmi les dangers de la mer aux quels ils estaint exposés tous les jours si cette detestable qui volait faire quelques étranges ignominies au sainct sacrement demeurait impunie. Aux quels n'ayant peu satisfaire n'y faire entendre aucune parolle à cause du grand bruit et tumulte, A la suasion des dicts recteur et Baïfe nous nous serions retirés de la foule de vers le grand autel d'où aurions apperceu plusieurs de la dicte foule se jester vers la partie de la dicte sacristie pour se saisir de la dicte prisonnière, et s'estant le dict procureur du roi de Labourd contre-opposé à leur entrée, aucuns de la troupe luy auraint parlé en ces termes: Eh quoi! Jesus-christ n'a yl pas enduré aussi bien pour nous que pour vous et pour les plus grands du monde? Pourquoi ne nous ressentirions nous doncques de l'offense qui luy est faicte? Ce crime n'est pas commis en meurtre, larrecin ou autres semblables excès.

Et un peu après aïant ceste malheureuse esté tirée de la dicte sacristie, comme elle fut au milieu de la dicte eglise, toute la populasse se rua sur elle, criant à haute voix, la voicy, la voicy, et le tocseing sonnant elle fut amenée vers la place publicque du dict lieu. Et ensuite nous retirants vers le dict logis d'Arguibel en compagnie des dicts recteur, Baïfe et Jurats et aussi des principaulx du dict lieu passants par la dicte place y aurions veu grand feu environné de force peuple, auquel cette miserable fut bruslée toute vive chacun y apportant du bois et y accourants comme à un feu de joye.

De la quelle violence estant bien marris et desplaisants serions retirés chacun chez soy, aucuns attribuants ceste émotion et fureur à l'énormité du sacrilège excecrable de ceste malheureuse, Et l'exécution d'ycelle tant precipitée, au zèle de Dieu et de la religion et à la crainte que ce peuple avait qu'estants eux absents vers les Terres-neufves comme ils estaint sur le point de partir ce crime demeurast impuni.

Le lendemain qui estait le vingtiesme du dict mois à environ l'heure de dix heures du matin, estants en la dicte eglise pendant que le recteur disait la messe en presence du peuple nous aurions faict séparer les dictes espèces sacrées du dict linge dans une patène, lesquelles le dict recteur receust très volontiers à la communion

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avec laveure de l'endroit du dict mouschoir que la saincte hostie touscha et ordonnant que lon se servist d'iceluy à l'advenir de purificatoire.

Ce faict, nous nous serions retirés au logis du dict recteur ou aurions faict venir l'hostesse de ceste malheureuse, la quelle nous aurait faict entendre qu'il y avait environ vingt jours que ceste malheureuse s'était retirée én sa maison au près d'une sieure sario qui y estait logée depuis quelque temps avec une sieure fille, lesquelles le jour du dimanche précédent dixseptiesme jour du dict mois, la dicte hotesse avait advertie que le dict recteur faisant le prosne avait exhorté tous ses paroissiens à se confesser et communier pendant le temps de Pasques et à porter à ce devoir tous ceux qui pouvaint dependre d'eux ou logis en leurs maisons, que pour y satisfaire elle estait obligée de leur en donner advis comme elle faisait et que le lendemain qui estait le dixhuictiesme du dict mois ces trois Portugaises les quelles au reste ne se trouvarent que fort rarement aux divins services pour quelques reproches qu'elle leur en fict, s'en allarent à l'Eglise, et environ l'heure de onze à douze heures les veux s'en retourner sans cette malheureuse. Elle leur aurait demandé où elles l'avaint laissée, mais ces Portugaises luy répondirent qu'elles ne savaint pas ce qu'elle estait devenue depuis le matin, qu'ayant entendu despuis le Subjett pour le quel elle avait esté retenue en la dicte eglise, elle fut confirmée en la mauvaise opinion qu'elle avait de leur religion et qu'elle les avait congediées de la maison, comme faisait aussi le reste des habitans du dict lieu pour la mesme mauvaise opinion qu'ils avaint consçu d'eux et de leur religion.

Par après plusieurs personnes du dict lieu nous auraint dict que la plus part de ces gens estaint soupçonnés d'estres Juifs et de vivre suivant la loy mozayque aiant esté surprins es années précédentes faisant cuire un jour de Rameaux une fournée de pains azymes et sans levain pour solempniser leur Pasque. Qu'une autre fois aussy on les avaitt trouvé de nuict avec des lampes et des torches allumés et fouettants le crucifix, saisis des livres contenants ceremonies Judaïques, et que pour toutes ces meschancetés n'ayant pas esté punis, ceste populasse irritée et mutinée par ceste dernière abomination aurait esté portée à une

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violence si extresme que de les chasser avec telle fureur, leur commandant de se retirer hors du dict lieu pendant trois jours sans que par considération quelconque l'on l'aye peu faire relascher. En foi et temoingnage très véritable de tout et dessus avons dressé cestuy mesme présent Procès-verbal à celle fin que de raison, que nous avons signé et faict signer à nostre greffier le trente mars mil six cent dix neuf.

Morsabard.

Lieutenant Général et officier de Baïonne.

Etchepare.

Greffier.



He visto y leido el original de este proceso, cuya copia envío á la Real Academia por si le place sacarlo á luz en su Boletín. No creo que se haya publicado; la última edición de Goyetche Saint Jean de Luz (1883) no hace ninguna mención de él. La copia, que acompaño, la hizo para mi uso M. Letrone, padre del pintor parisiense M. Luís Letrone.

La colonia hebraizante de portugueses, de quienes el proceso hace mérito, se había establecido desde el año 1496 en Ciboure y alrededor de San Juan de Luz. La acusación de sacrilegio, como casi todas las de su clase, no llegó á probanza plena, por más que el cuerpo del delito y los rumores de la plebe, concitada hasta el exceso que se ha visto contra la infeliz Catalina, permitan suponer que la colonia, cristiana en apariencia, practicase en secreto el rito mosaico, y detestase cordialmente el que le era impuesto por la intolerancia reinante en aquella época. El azotar las imágenes del Crucifijo y el profanar la Hostia cabe ciertamente en mentes extraviadas y en corazones ulcerados por el rigor de que eran víctimas. Los misioneros católicos ¿no destruían al propio tiempo los ídolos? Algunos hugonotes en Francia, ¿trataron con mayor benignidad las imágenes? La ley de la reacción explica no pocos hechos. Por esta razón no seré yo quien tache de inverosímil y absurdo el hechizo sacrílego1 que la Inquisición de Torquemada

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castigó con la hoguera en los presuntos asesinos del famoso Niño de la Guardia.

Cabe admitir, no obstante, la explicación que dió la desventurada Catalina de Farandea, diciendo que su acción de recoger la Hostia en un pañizuelo procedió más bien de reverencia, y fué efecto de un estornudo por su parte involuntario que atribuyó al que llamaba pecado, esto es al demonio, ó á compresión diabólica. Había nacido hacia el año 1560 en un pueblo que el manuscrito denomina Francose, con arreglo á la pronunciación francesa del vocablo geográfico Francos, que en el Noroeste de la Península se repite tan á menudo, y recuerda los buenos tiempos y aventuras de los yernos borgoñones de Alfonso VI. Era viuda, criada desde su infancia en la religión católica; y como no consta que viniese á Francia perseguida por la Inquisición, su declaración resulta más admisible. Hacía casi un mes que había llegado á San Juan de Luz, y se albergaba con otras dos portuguesas en casa de una matrona, que habiendo acudido el día de Domingo de Pasión (17 Marzo) á escuchar el sermón del cura en la parroquia, intimó á sus inquilinas el monitorio de cumplir con el precepto pascual, que practicaron el día siguiente. Con qué ánimo, Dios lo sabe. El fanatismo popular, que arrolló frenético los derechos de la acusada, y la quemó viva, es menos detestable que la fría crueldad de Laubardemont, emisario del cardenal de Richelieu, condenando jurídicamente á la misma pena en 1634 á Urbano Grandier, capellán hechicero y nada venturoso de las Ursulinas. Eso estaba en la índole de un siglo, que acabó viendo fenecer la prepotencia de España bajo el cetro de Carlos el Hechizado.

El proceso verbal (18-30 Marzo, 1619) contiene otros pormenores dignos de notarse para la edificación de la historia: las expediciones marítimas al banco de Terranova; la lengua francesa que no entendía la gente de San Juan de Luz, que hablaba el puro vascuence; y la castellana que servía de vehículo á la colonia hebreo-portuguesa para darse á entender, como lo demuestran las palabras de Enrique Fernández, dirigidas á M. Lissardy, en el momento en que este sorprendió á la desgraciada Catalina. Los sacerdotes portugueses, que salen á la escena, habían dejado

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su país natal y se habían refugiado en Francia. En particular D. Manuel de San Fiiz2, aunque se hallaba en regla, ó bien documentado con las dimisorias de su obispo, estaba encausado por la Inquisición: «il s'estait absenté de sa patrie pour quelques accusations et pour éviter la rigueur de l'Inquisition.» Como este caso de refugio, otros anteriormente, y á no dudarlo, habrían ocurrido.

La venida de la colonia hebrea á San Juan de Luz ha sido sólidamente establecida sobre el terreno de la crítica, ó demostrada por M. Jules Balarque en doctísima obra que publicó disfrazando su propio nombre, y tituló: Bayonne et Saint-Esprit. Étude historique par le Baron Rignon3.

Hé aquí algunos extractos de tan interesante estudio4:

«C'est à la suite de cette dernière persécution5 qu'un certain nombre de familles juives, plus constantes dans la foi de leurs pères, vinrent chercher un asile dans nos contrées. De là le nom de Portugais qui leur resta.

»Ces malheureux se fixèrent d'abord sur les points les plus rapprochés de la frontière d'Espagne; à Ciboure surtout, où le Port de Saint Jean de Luz leur permettait d'entretenir des rapports avec leurs frères de Portugal. Leur établissement prospéra; il fut même légitimé, sans nul doute à prix d'argent par lettres patentes d'Henri II en date du 1er novembre 1550. Ces lettres les qualifient de marchands portugais ou nouveaux chrétiens, et l'on doit en inférer qu'ostensiblement du moins ils ne pratiquaient pas la loi mosaïque.

»Les familles se distinguaient entre elles par les noms les plus éclatants de l'Espagne et du Portugal: Pimentel, Nuñez, Rodriguez, Furtado, Silva, Fonseca, Pigneiro, Oliveira, Carvalho, Dacosta.»



La brillantez de estos apellidos no debe causar asombro. Algunos

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provinieron del de los magnates que en la pila bautismal apadrinaron á los conversos ó cristianos nuevos.

Entre los apellidos de las familias hebreas ó hebraizantes, avecindadas en San Juan de Luz, cita M. Balarque el de Fonseca. Lo cual me induce á pensar que acaso no ande desacertado quien redujere á esta localidad la patria del famoso rabino Isaac Abuab de Fonseca, insigne predicador y maestro en la primera cátedra de sagrada Teología. De un texto citado por Graetz6 se infiere que nació en San Juan de Luz hacia el año 1606, y que siendo todavía niño fué llevado por su madre á la ciudad de Amsterdam, donde había de ser una de las principales columnas del judaismo. La familia era oriunda de Castro d'Ayre, sobre el camino de Almeida á Lamego, en la provincia de Beira. Los archivos de San Juan de Luz no me han suministrado hasta el presente mayores datos para mejor ilustrar esta cuestión, que se codea con otra referente al autor del manuscrito en vascuence que posee Lord Macclesfield. El autor de este manuscrito nos dice que fué pastor, ó ministro protestante, natural de San Juan de Luz; pero en esta localidad no hallo memoria de él, como tampoco del sitio del edificio, que dió su nombre á la rue du Temple.

Sare 18 de Junio de 1889.





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