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La presse et les transferts culturels en Espagne au XIXe siècle (1833-1914)

Jean-François Botrel



Comme l'observe Christophe Charle, «une grande partie de la dynamique intra-européenne au cours du XIXe siècle trouve son origine dans les déphasages et transferts culturels permanents entre les petites et grandes nations ou les nations avancées et les nations retardataires» (2002, pp. 248-249.) Dans ce cadre asymétrique, qui peut caractériser la situation de l'Espagne à condition de l'élargir à l'Amérique hispanique et de tenir compte des transferts de la Catalogne au reste de la péninsule, la presse (les journaux et les revues) a joué un rôle déterminant bien que non exclusif, sous forme d'importations et d'exportations de biens matériels ou immatériels ou, au contraire, comme une incitation au repli sur soi.

A partir d'une problématique rappelée par Emmanuelle Loyer et Ludovic Tournès (2005, p. 188) concernant les conditions sociales de l'import-export intellectuel et la notion de transfert culturel, ou par et Marie-Ève Thérenty et Alain Vaillant (2005, p. 285) pour une histoire culturelle des poétiques au XIXe siècle, il s'agira donc d'apprécier le rôle et la fonction dans les transferts culturels d'une presse espagnole qui suit avec un décalage notable et à un niveau de diffusion bien moindre, mais dans une isochronie globale, celle de la France et de l'Angleterre essentiellement, en mettant à profit la plupart des études existantes, une fréquentation ancienne et assidue de la presse espagnole ainsi qu'une récente expérience d'édition de l'oeuvre journalistique complète de Leopoldo Alas Clarín1, afin de permettre d'éventuelles comparaisons.






Réalités

Il faut partir d'une donnée fondamentale: dans les années 1830, la France est en Espagne le référent privilégié. Comme l'écrivait à sa façon Georges Le Gentil (1909, p. VIII) -ce qui nous invite à réfléchir sur le point de vue à adopter en matière d'histoire culturelle comparée-, «de toutes les influences venues de l'extérieur, la nôtre un instant contrebalancée par l'influence anglaise, celle de l'Allemagne ne s'étant pas exercée de façon continue, est de beaucoup la plus efficace». C'est effectivement de France -ainsi que d'Angleterre et d'Allemagne- que sont importés les principaux équipements pour l'impression des journaux, y compris les «ustensiles» et les bois préparés pour la gravure2.

Favorisée par le développement des transports terrestres, la circulation des hommes, qu'il s'agisse d'exils ou de voyages de formation ou de prospection3, permet de plus en plus à l'Espagne, où la télégraphie électrique assure dès le milieu du XIXe siècle la circulation des dépêches4, de vivre dans un temps national mais aussi européen. Les correspondants à Paris5, en plus des passeurs conscients des enjeux culturels et économiques (journalistes et éditeurs6), utilisent la presse pour transférer de façon plus ou moins organisée et efficace ce qui leur semble pertinent pour le développement de leur pays.

En effet, si une bonne partie de l'information peut être puisée dans la presse publiée en France, en français ou en espagnol7, et directement consommée sur tout le territoire espagnol8, c'est principalement par imitation, acclimatation ou assimilation que se produisent les transferts. Pour qui s'est intéressé à la presse espagnole de l'époque romantique, il est assez aisé de déceler les modèles trouvés auprès des «grandes soeurs européennes» tant pour ce qui concerne la morphologie de la presse que pour ses contenus.

Le mimétisme des titres est bien connu9, mais c'est la forme même du journal qui se trouve concernée10: ce que Le Gentil (1909) observe pour la période romantique11 est en effet perceptible dans la durée, à travers l'émergence d'une presse d'information12, les illustrations13, mais aussi plus tard la «petite presse» -tel El Imparcial (Barrera, 2000, p. 120)-, les revues comme La España Moderna, les magazines ou tel ou tel genre journalistique, comme les articles de moeurs, les suppléments littéraires, le conte, le reportage, ou encore le sensacionalismo (Seoane, p. 259). Quant aux contenus, outre le phénomène bien connu des feuilletons - et, plus tard, des contes -traduits du français14, on peut remarquer qu'à travers les nouvelles de Paris, la critique théâtrale peut être aussi parisienne que madrilène15, mais qu'en outre beaucoup d'éléments iconographiques -patrons de mode ou illustrations- sont directement importés de France.




Les Modalités

Plus intéressantes que les réalités elles-mêmes, sont les modalités d'importation ou de transfert, qui renvoient au caractère fondamentalement composite du périodique, comme produit d'assemblage, parfois fait de bric et de broc, avec des ciseaux16.

Dans les pratiques rédactionnelles, on peut en effet assez facilement observer les traitements appliqués aux éléments importés et empruntés: par incorporation directe dans le cas des patrons ou des images17, qui peuvent aussi être décalqués (Le Gentil, 1909, p. 127); après traduction pour les dépêches reproduites ou les informations tirées de la presse étrangère18, avec ou non réélaboration. Car pour tel emprunt repéré, combien d'autres nous échappent? «Nous sommes nés copieurs», dit El Panorama en 1839 (Fernández Sánchez, 1997, p. 290) et l'Espagne est habitée par la «fureur de traduire» (ibidem). Telle revue comme la Revista Europea se contentera de choisir, de traduire ou de résumer les meilleurs articles des revues européennes (Le Gentil, 1909, p. 76) ; de même pour El Panorama qui «vit aux dépens de périodiques étrangers» (Le Gentil, 1909, p. 93.) Dès lors c'est le travail de sélection qui intéresse19, ainsi que les effets de la traduction avec toutes les libertés imaginables prises à l'égard de la source.

Certaines publications, soucieuses de contrebalancer l'influence française, appliquent les mêmes modalités à la presse allemande. C'est le cas, entre 1862 et 1874, de LaAbeja (L'Abeille) qui justifie la métaphore de son titre en affichant sa volonté de «goûter à tout et de faire son miel de tout ce qu'elle trouvera de bon où que ce soit» et d'offrir son nectar aux amateurs de «progrès rationnel»20. Des démarches semblables ont dû concerner la presse anglaise.

Mais on ne saurait non plus ignorer qu'en réaction, quelques périodiques, comme El Laberinto (voir Fernández Sánchez, 1997), se font une ligne éditoriale de l'ignorance systématique de l'étranger et que l'Espagne est elle-même exportatrice -parfois réexportatrice- de biens journalistiques en direction de l'Amérique hispanique21, en concurrence avec la France essentiellement22. Au sein même de la péninsule Ibérique, à travers des entreprises ibéristes, qui concernent le Portugal mais aussi la Catalogne, on connaît plusieurs tentatives d'organiser les échanges, flux et transferts, y compris en faisant l'économie de la traduction23. Avec un projet et un horizon néolatins, Raza Latina, puis El Mundo Latino, s'efforceront, à la fin du siècle et au tout début du XXe siècle, de résister, avec plus ou moins de bonheur mais en espagnol, à la menace culturelle allemande et britannique24, alors qu'en France c'est à peine si la presse connaît l'existence de l'Espagne25.

L'inventaire, tant des réalités que des modalités des transferts culturels via la presse, est certainement encore à parfaire sur pièces, et une meilleure connaissance à obtenir dans d'autres domaines que la littérature, la science et la technologie en particulier. Reste qu'il est difficile de rendre compte ainsi de ce qui est souvent immatériel et toujours en construction et que c'est sans doute la démarche d'hispanisation à l'oeuvre dans la presse qui intéresse in fine. Dans tous les cas, il conviendrait certainement de mieux pouvoir mesurer, plus que le degré de dépendance, le niveau d'acclimatation et son inscription, avec un décalage plus ou moins grand, dans le temps commun européen.




Perceptions

La presse, en effet, n'est pas avare de réflexions à ce sujet. Pour elle, la France est la pierre de touche26; si la référence française est «incontournable quand on parle de littérature» (Fernández Sánchez, 1997, p. 288), elle exprime aussi de l'amertume devant tant de dépendance: «Il ne faut pas perdre de vue que nous parlons et écrivons en français; que c'est en français que nous pensons, que nous mangeons», écrit le Semanario Pintoresco (Le Gentil, 1909, p. 63). Le journal El Clamor Público peut, le 28 octobre 1850, regretter qu'en Espagne «nous soyons dans l'obligation de nous alimenter de traductions pratiquement chaque fois que nous voulons remplir d'une lecture agréable le feuilleton des journaux» (Botrel, 1993, p. 78); des feuilletons qui sont «une servile imitation à la française jusque dans leur nom», écrit La Censura en 1844 (Lécuyer, Villapadierna, 1995, p. 15), avec un sentiment d'impuissance devant une telle déferlante (voir Baulo, 2006, p. 483). On a certes conscience que l'Espagne est en retard par rapport à d'autres nations plus avancées, mais aussi que la France fait peu de cas de son voisin ou en a une idée peu précise: c'est pourquoi Lista a le patriotique projet de «réfuter les sarcasmes, critiques et fausses nouvelles sur l'Espagne qu'on peut lire dans les journaux étrangers» (Barrera, 2000, p. 72), et Clarín, qui constate que «même avec notre soleil si diaphane, qui leur semble être africain, ils nous voient de façon assez brouillée, à supposer qu'ils nous regardent», se prend à espérer, non sans ironie, le 23 septembre 1895 (Alas, 2005, p. 315), que vienne le temps où «les Français étudieront les choses de chez nous avec tout le soin scrupuleux qu'ils mettent à bien connaître, par exemple, Madagascar à la conquête de laquelle ils aspirent».

Devant cette situation, deux attitudes se font jour dans la presse. La première, à dimension identitaire et incarnée par quelqu'un comme Eugenio de Ochoa, exprime, dans les années 1840, la volonté de se percevoir hors du prisme français: «Coexiste dans l'harmonie une fervente admiration pour les idées nouvelles et pour les principaux écrivains du pays voisin avec le rejet systématique de toute tentative de remplacer les oeuvres littéraires, les danses, les modes ou les moeurs espagnoles par celles d'origine française» (Simon, 1946, p. 8.) Quant à Clarín, à la fin du siècle, il revendique, avant Unamuno, l'européité de l'Espagne: «L'Espagne n'a pas besoin qu'on l'européise -en voilà une expression!- parce qu'elle est déjà européisée», écrit-il dans Madrid Cómico le 31 mars 1900; en insistant, le 16 avril 1900: «L'Espagne est un peuple aussi européen que tout autre, malgré son impéritie, son ignorance et son retard»: «penser, sentir, aimer... tous ou beaucoup d'entre nous savent le faire à l'européenne, et, si l'on peut dire, encore mieux, à l'universel» (Alas, 2006, p. 1.036.)

C'est depuis ces positionnements par rapport aux réalités et aux modalités des transferts qu'émergent la conscience complexe d'un retard et d'une dépendance mais aussi la nécessité d'affirmer la dignité du pays.




Intentions

Dans ce domaine, on ne peut évidemment oublier que la prétention à ignorer les autres et à vivre coupé d'eux, dans l'autarcie, a pu exister -on l'a vu avec El Laberinto qui lui donne une dimension patriotique-, particulièrement dans certaines parties de l'Espagne, mais aussi qu'aucun cordon sanitaire dans l'histoire n'a pu empêcher les transferts ni la circulation des idées. Clarín peut donc se gausser de l'attitude de «la plupart de nous écrivains qui croient que l'Espagne se suffit à elle-même, en s'inspirant de son ciel bleu, de sa guerre de huit siècles, de sa grandeur passée, avec ses possessions où le soleil ne se couchait jamais, etc.; tous croient, ou du moins beaucoup d'entre eux, que l'originalité exige une ignorance troglodyte27».

À l'opposé, des projets d'ouverture de l'Espagne ont très tôt été portés par la presse: il faut citer ici l'emblématique El Europeo, la première revue romantique espagnole, bientôt suivie par El Laberinto (1843-1845) qui aspire à moderniser l'Espagne, à la civiliser, à la mettre au niveau des autres nations mais sans imitation ni «copie traductrice» (Fernández Sánchez, 1997, p. 296). Plus tard, un journaliste comme Clarín, en bon krausiste réformateur, pense que tout ce qui vient de l'extérieur contribue à ce qu'il appelle la «prospérité intellectuelle» de l'Espagne et théorise, en le pratiquant, l'échange intellectuel avec l'étranger pour saper «la muraille de Chine que notre ignorance, notre paresse, notre vanité et nos préjugés ont élevée aux frontières de notre esprit national». Des années avant qu'Unamuno ne le recommande, pour «espagnoliser l'Europe», Clarín «fait la digestion de cette partie de l'esprit européen susceptible d'être transformé en esprit propre à l'Espagne», en affirmant avec insistance, en 1892: «Aujourd'hui où nous pouvons tirer si peu de nous-mêmes pour alimenter la culture, il est plus nécessaire que jamais d'assimiler ce qui vient de l'étranger, de le comprendre, de le sentir, de l'étudier, etc.», car «nous avons moins besoin de ce qu'en dehors de l'Espagne on nous écoute et considère, que de considérer et lire les autres, et plus particulièrement certains peuples plus avancés» (Botrel, 2001.)

Cette situation asymétrique, où la quasi-ignorance de l'importateur espagnol par l'exportateur -français essentiellement- semble la règle, se trouve, du point de vue espagnol, de plus en plus compensée par la volonté de retrouver, notamment à travers la presse espagnole mais aussi intercontinentale, une certaine influence dans les anciennes colonies et néo-républiques de l'Amérique latine, en luttant contre le «gallicisme intégral» qu'on peut observer, mais aussi de créer de nouveaux équilibres grâce à la promotion d'un ibérisme littéraire qui implique l'Espagne, le Portugal mais aussi la Catalogne. En témoigne une revue comme la Revista crítica de historia y literatura españolas, portuguesas e hispanoamericanas, dirigée par Rafael Altamira.

Au demeurant, l'importation peut être passive ou au contraire activement recherchée après analyse et expertise, selon des procédures réfléchies. La première attitude est prise pour cible par Clarín, qui affirme: «En Espagne, en général, on a peu le goût de l'étude et l'on étudie encore moins la vie intellectuelle des pays qui par rapport à nous ont pris de l'avance dans ce domaine... Quand nous imitons les Français, et le fait d'imiter est dommageable en soi, puisque c'est une indigestion de la tête, nous imitons ce qu'ils ont de pire» (Alas, 2004, p. 109.) Au contraire, El Siglo Pintoresco se lance en 1845 «après avoir observé comment fonctionnent des publications du même genre en Allemagne, en Angleterre et en France» (Barrera, 2000, p. 101.) Clarín peut donc affirmer, par exemple, le 16 février 1895, que «la grande presse, celle qui a une fonction de guide, doit faire comme en France, en Angleterre, etc., où, en plus des publications spécialisées, la littérature peut compter sur tout l'espace nécessaire dans les grands journaux28». Pour la presse espagnole, à l'instar de celle d'Angleterre, de France ou d'Allemagne où le journal est également un organe d'idées, parce que «l'idée a une vie harmonique qui requiert l'expression quotidienne29», il faut revendiquer «les idées d'abord». De là l'ordonnance du médecin et journaliste, le 24 mars 1895: «Je pense qu'il est hygiéniquement opportun de donner au peuple ibère, aussi noble que paresseux, la plus grande quantité possible de lettres, de bonnes lettres, à travers ces préparations journalistiques, les seules que tolèrent l'estomac faible du patient.»




Effets

Au-delà des intentions proclamées et des réactions identitaires, il est plus difficile de mesurer, dans la longue durée, l'impact linguistique qu'a pu avoir la publication de ces textes traduits du français et encore plus les conséquences intellectuelles de ces transferts permanents.

Comme le rappelle justement Clarín, le 11 août 1899, la différence de langue «sépare plus qu'une cordillère» et, par ailleurs, la traduction n'est qu'un pis-aller dont il dénonce à son tour les conséquences30. S'agissant de la littérature, la langue, dit encore Clarín le 23 juillet 1900, est «l'élément essentiel, à la source de différences et même de séparations qu'impose la nature même des choses». De là la revendication utopique de relations littéraires internationales où les littératures nationales seraient données à lire dans la langue d'origine. Clarín n'y croit sans doute pas trop, lui qui lit le français et à un moindre degré l'allemand et l'anglais, mais l'argument lui permet d'invoquer son incompréhension du catalan pour ne pas parler de la littérature catalane.

À propos des «transferts d'idées» qui peuvent être opérés à travers la presse, il convient avec Clarín d'établir une distinction entre ce qui n'a pu être que consommation superficielle d'imitations de même acabit31, et qui n'a sans doute eu d'autre effet que la satisfaction immédiate, passagère et illusoire d'un lectorat avide de quelconques «articles de Paris32», et la sélection d'articles choisis, qui implique l'existence d'informateurs et de médiateurs préparés à cet effet33.

Encore faut-il faire la différence, précise Clarín le 16 octobre 1893, entre les relations littéraires internationales et le cosmopolitisme littéraire. Dans le premier cas, il s'agit selon lui de «faire connaître dans chaque nation ce que l'autre produit, également en tant que nation, sans rien lui enlever de son sceau particulier», de la façon la plus fidèle possible, sachant que l'accès à la langue des autres n'est pas forcément généralisé et que pour passer d'un côté à l'autre des Pyrénées, il faut sans doute emprunter le tunnel de la traduction, avec le risque constant que le train qui entre d'un côté ne soit pas le même en ressortant. Le cosmopolitisme littéraire, quant à lui, a pour effet d'effacer tous les caractères nationaux à force de les assimiler et de les accumuler, «ceux qui le pratiquent prenant des étrangers des idées, des formes, mais sans respecter la nationalité dans le langage, ni dans la relation au milieu».

Tout en pratiquant assidûment le cosmopolitisme, en tant qu'espagnol et patriote, Clarín aurait préféré des relations littéraires internationales plus équilibrées (Alas, 2005 (a), pp. 578-579). Reste que dans l'un et l'autre cas, c'est essentiellement à travers la presse, d'El Europeo jusqu'à La España Moderna en passant par les innombrables journaux qui publièrent les articles de Clarín, que peuvent être observés les stratégies et leurs effets dans un temps appréhensible.

Au-delà de l'inventaire qui révèle pour l'Espagne une asymétrie structurelle dans les échanges culturels avec la France et l'Europe du Nord, où se trouve l'essentiel du matériau de référence, mais aussi avec l'Amérique hispanique, les échanges avec les autres parties de la péninsule Ibérique restant à peine ébauchés, il faut évidemment considérer, avec Jean-René Aymes et Javier Fernández Sebastián (1997, pp. 336-338), que tous ces transferts, opérés principalement à travers la presse, vont au-delà de simples relations bipolaires, qu'ils se font dans un cadre de révérence ou de dépendance mais aussi d'ignorance ou de concurrence et surtout qu'ils impliquent de nombreuses pratiques de filtrage ou de métissage et donnent lieu à des jeux spéculaires faits de répliques, d'échos ou de ricochets dont l'histoire de la presse et l'histoire culturelle doivent tenir particulièrement compte. Du fait de son dialogisme structurel, la prise en compte effective de la presse pour elle-même (Aubert, Botrel, Desvois, 1981) aide à dépasser la vieille problématique des influences ou de la dépendance au bénéfice de processus de circulation, de médiation et d'interaction, de rejet ou d'appropriation et parfois d'assimilation.

S'agissant de l'Espagne considérée dans l'ensemble européen mais aussi dans ses relations avec l'Amérique hispanique, la presse permet de constater, au jour le jour, que les phénomènes culturels sont plus synchrones qu'on pouvait l'imaginer, même si la connaissance ou la conscience des faits est inégale, en fonction de divers facteurs idéologiques, et qu'il existe toujours la consolation de savoir que quelqu'un est plus en retard que soi. En variant ou en déplaçant les lieux d'observation et en rétablissant le mouvement d'échanges qui caractérise la vie de la presse au quotidien, l'approche comparative de la presse (dont le rôle stratégique, ne peut être considéré qu'écologiquement, c'est-à-dire en lien avec les autres formes d'expression sociale, artistique et scientifique) permet de sortir d'un carcan strictement national et de mettre au jour une histoire culturelle beaucoup plus cosmopolite qu'on ne l'imagine.






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