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Le célèbre dicton figure dans la farce de Molière (sc. 8) sous la forme: «vita brevis, ars vero longa».



 

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Lucinde, appelée Rosinda, puis Lucinda d'après les distributions successives des rôles dans le ms. 16107 de El médico por fuerza, devient doña Paula chez Moratín; ce dernier fait de Jacqueline, nourrice chez Géronte, une Juliana en 1814, rebaptisée Andrea en 1825. Le domestique Valère, pour sa part, cèdera la place à un Ginés plus authentiquement -plus traditionnellement, devrions-nous dire- espagnol. Quant à Sganarelle, il est nommé Bartolo par les deux adaptateurs.

A ce propos, précisons qu'il est difficile de déduire des différents «repartos» les dates auxquelles El médico por fuerza aurait pu être jouée, car bien des acteurs sont désignés non par leur nom, mais par leur rôle au sein de la troupe («barba», «graciosa», etc.).



 

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Le Bartolo moratinien, après s'être fait rosser, n'admet seulement, comme Sganarelle, qu'il est médecin et apothicaire, mais «cirujano de estuche, y saludador, y albèytar, y sepulturero, y todo quanto hay que ser», (I, 4); si cette relation implicite entre la médecine et le trépas du patient ne date pas d'alors, comme bien l'on sait -Sganarelle, au début de l'acte III de Molière, précise que les morts ne demandent jamais de comptes au médecin qui les a tués, phrase que reprendra l'adaptateur anonyme au second acte, et que Moratín, lui, a préféré omettre malgré une longue tradition attestée notamment par Covarrubias, Andrés Laguna et bien d'autres-, sa formulation, par contre, nous incite à établir un rapprochement non dépourvu d'un certain intérêt: en effet, à la fin du premier acte de El médico por fuerza, le Bartolo de l'anonyme, convaincu malgré lui de ses talents, s'apprête à rendre visite à sa malade et ordonne: «Vaya uno delante a prevenir el vestido, y otro que se llegue a la Iglesia y que prevenga la sepultura y el entierro». Cette phrase, qui a, peut-être, inspiré à Moratín son allusion au «sepulturero» mais qui ne figure pas dans les répliques du Sganarelle de Molière, nous la retrouvons justement dans une adaptation très libre du Médecin malgré lui, La muda enamorada, «sainete» de Ramón de la Cruz (1762) récemment identifié comme tel (nous connaissons trois exemplaires mss. de cette oeuvre, dont deux sont conservés à la B.M.M -1-165-44-, le troisième à la B.N.M. -14529/1-; l'un des deux premiers comporte les censures officielles datées du 28 mai au 3 juin 1762; un certain nombre de passages ont été marqués pour n'être pas représentés et le copiste du dernier ms. cité n'a pas rigoureusement tenu compte de ces suppressions): après la bastonnade, Blas, c'est à dire Sganarelle, s'écrie: «...muera el Lugar / y toda su parentela / primero; vamos allá / unos, y otros a que tengan / abierta la sepultura / pueden marchar a la Iglesia».

Il est difficile, et finalement assez peu probant, de comparer un court «sainete» et une comédie en trois ou même en deux actes. Bornons-nous donc à quelques remarques: contrairement à ce que fera Moratín, Cruz tente de conserver une partie du célèbre passage de la sc. 1 de l'acte premier de Molière, dans laquelle Sganarelle riposte ironiquement aux reproches de Martine (il semble d'ailleurs avoir pris dans son sens propre l'expression: «j'ai quatre pauvres petits enfants sur les bras» et en réduit prudemment le nombre à deux...). D. Leandro regrettait, avons-nous dit, de s'être vu contraint de supprimer, avec M. Robert, personnage épisodique, la «graciosa scena 2.ª del primer acto»; Cruz, pour sa part, fait intervenir un «zapatero» dans la querelle de ménage et garde donc, en raccourci, l'essentiel de l'original. Horace n'est pas seulement évoqué, mais présent sur scène en la personne d'un «Novio» assez balourd, et Géronte, comme il se doit, est devenu «D. Esteban le hidalgo», alors qu'il sera élevé au rang «d'hacendado rico» par un Moratín fidèle à ses principes autant qu'à Molière.

Quelques jolies trouvailles: le «chapitre des chapeaux» d'Hippocrate devient le «quarto / tratado de sanguijuelas» de Galien; Blas étant, selon l'usage, guitariste distingué, on chante et on danse comme dans bien des «sainetes», et sa thérapeutique consiste non plus en du pain trempé dans du vin, mais en des «seguidillas» endiablées. Incapable de faire prononcer le «» à sa future qui émet finalement un «sssó», le «Novio», découragé, s'écrie: «Canela; / que la llaman acia le Pardo / y ella responde en Illescas». D'autre part, l'amant est déjà «cirujano», ce qui lui évite de se travestir, et la muette, sous prétexte de lui tendre, semble-t-il, le pouls, lui donne sa main, scellant ainsi un engagement au mariage envers et contre tous. Enfin Cruz, particulièrement en verve, nous offre d'emblée une longue série d'hendécasyllabes «pareados» à la française -dont Moratín ne pouvait supporter la symétrie dans le Sancho García de Cadalso- avant de reprendre son souffle par un sage retour au «romance», plus approprié au genre mineur. Quoi qu'il en soit, le «sainete» est bien enlevé, pourvu d'une intrigue, ce qui était loin d'être le cas de tous ses pareils, et d'une intrigue qui, bien qu'inspirée de Molière, ne se réduit pas, tout compte fait, à un calque servile de celle de l'original. Sans doute cela explique-t-il en partie pourquoi Cruz fait observer au spectateur, avant la «tonadilla» finale, que son «Idea... distintos rumbos estrena».






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