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Satire et mort des nationaux dans «Margarita, está linda la mar» de Sergio Ramírez

Nathalie Besse





Margarita, está linda la mar de Sergio Ramírez, roman inspiré de l'Histoire du Nicaragua, relate d'une part le retour triomphal au pays du grand Rubén Darío en 1907, et sa mort neuf ans plus tard dans la ville de León, d'autre part la venue et l'assassinat du dictateur Anastasio Somoza García en 1956 dans cette même ville où les conspirateurs de «la mesa maldita» écrivent la légende du poète. Le Docteur Debayle, futur beau-père du tyran, relie, entre autres personnages, ces deux périodes. L'exergue empruntée à Aristophane annonce la tonalité de l'ouvrage qui dépeint la satire de ces trois personnages dont l'autorité brocardée trahit la perte de dignité d'un Nicaragua meurtri, inhumant ses mythes dans un récit néanmoins comparable au divertissement.



Défiant, comme nombre de satiristes, la figure oppressive du pouvoir, le romancier diabolise Somoza pourtant appelé dans son pays el hombre, substantif porteur d'une humanité et une virilité démenties dans le récit, notamment par l'un des intrigants qui l'assimile au monstre de l'Apocalypse: «Vergüenza para nosotros y para la armonía del universo, que la bestia asiente su pezuña en estas calles» et, dans le même esprit, «ha nacido el anticristo, hermano. Y para nuestra desgracia, en Nicaragua» 1. Démon contaminant l'espace -«el aire huele a azufre, a mierda de diablo»2-, Somoza n'apparaît pas uniquement comme une créature satanique dont la dictature instaure donc le chaos, mais également comme un individu malsain associé aux matières fécales. Nommé «inspector de excusados»3 par la Rockefeller Foundation Sanitation Mission, Somoza est surtout raillé du fait de ce corps ridicule possédant sur le ventre un anus artificiel: «caga por la barriga [...] por medio de una válvula de goma»4; expulsant dans un sac de toile l'excrément qu'il paraît personnifier.

Que Sergio Ramírez exploite la veine démonique ou scatologique chère à la satire, l'intérêt réside dans la causalité établie entre l'homme du pouvoir et le pays qu'il voue à la souillure: «[...] gángster que sin tener culo se ha cagado en todo Nicaragua!»5. Le thème stercoral paraît trouver un écho dans l'image malpropre du porc liée à l'Histoire nicaraguayenne: en effet est évoqué Pedrarias Dávila «que fue el que trajo por primera vez los chanchos a Nicaragua. [...] un conquistador que se hizo poderoso criando chanchos. Éste es un país bueno para engordar chanchos», de l'avis de Rubén Darío6. Le lien se laisse saisir entre le premier gouverneur sanguinaire du Nicaragua et Somoza, fondateur d'une dynastie de dictateurs qui se sont autant «engraissés» que les législateurs du Palais National baptisé par les sandinistes La Chanchera7.

Ce despote luciférien et nauséabond fera castrer Rigoberto López Pérez qui tente de l'abattre: «Es para que… me le den… sopa de huevos… a la guardia…»8, plaisante un Somoza macabre recouvrant péniblement ses esprits après l'attentat. Cette mutilation trouve elle aussi une résonance nationale dans le sarcasme d'un conjuré qui étrille l'absence de vaillance au Nicaragua: «Éste es un país de eunucos»9. Cette remarque méprisante qui réprouve la lâcheté de tous, paraît d'autant plus vraisemblable après l'émasculation du brave, comme si ce pays assimilé à un corps incomplet et mortifié, était condamné à ne jamais se rebeller ou s'émanciper: convient-il d'ajouter l'identité amputée à la perte de dignité du pays maculé par son propre dirigeant?

On en trouve indirectement confirmation avec le très risible Docteur Louis Debayle dont la profession se prête volontiers à la satire. Sergio Ramírez offre un portrait au scalpel de ce chirurgien boucher ironiquement surnommé «el sabio Debayle» que l'impéritie ou l'ambition convertissent en fossoyeur: rendant celui-ci aveugle et cet autre impuissant, il opère un Rubén Darío terrifié pour lui extraire du foie un pus inexistant et accélère ainsi la mort du poète10. Ce dernier invective à plusieurs reprises le prétendu érudit: «estupidez», «soberana burrada», s'exclame le poète11 s'écriant lors de l'opération: «bárbaro», «carniceros», «¡Me van a matar!»12 comme si Debayle était en définitive de même engeance que le tyran.

Or, et s'agissant de la problématique de l'identité nationale, Debayle est «yankista», fervent défenseur des États-Unis qui selon lui préservent le pays de l'anarchie, ce à quoi un personnage rétorque: «El caos es el que siembran esos hijos del averno. [...] ¡Gorilas colorados, como los ha llamado el mismo Rubén!»13, recourant par là à une sémantique infernale et une animalisation qui ne sont pas sans rappeler la satire de Somoza; d'autre part ce sont des «marines» qui abandonnent dans un bain de sang le protégé de Rubén Darío, Quirón, qui les avait dénoncés pour profanation d'un cimetière où ils s'étaient livrés à une orgie. Les États-Unis sont donc associés à la sauvagerie comme le médecin qui voit en eux des sauveurs et comme l'oppresseur qu'ils soutiennent: Somoza García prend en 1933 la tête de la Garde Nationale créée par les États-Unis qui apprécient cet anti-communiste dévoué à leur cause. Ainsi la satire de Debayle dévoile-t-elle, lorsqu'on explore le texte subjacent, la perte de souveraineté du Nicaragua.

Si les personnages aux mains ensanglantées de Somoza et Debayle soutiennent la présence néfaste des États-Unis en terre nicaraguayenne, le triangle des turpitudes se referme avec le lien de parenté entre les deux hommes puisque le docteur est le père de Salvadora qui deviendra la femme de Somoza. Debayle étant peut-être apparenté par ailleurs à Henri Beyle alias Stendhal, l'un des comploteurs persifle: «-¡Entonces, ahora resulta que Somoza está emparentado con el autor de El Rojo y el Negro! ¡La mierda revuelta con la gloria!»14. Et inversement, est-on tenté d'ajouter dans ce récit qui, maltraitant toute renommée, rapproche toujours la gloire d'une terminologie excrémentielle.



Le roman discrédite l'autorité politique et scientifique, mais également celle, artistique, d'un Rubén Darío guère épargné par l'impertinence de Sergio Ramírez, non que l'auteur souhaite flétrir la mémoire du poète dont il prétend connaître l'œuvre par cœur et dont un vers -écrit sur l'éventail de Salvadora Debayle enfant- donne son titre au roman, comme à tous les chapitres du reste entre autres nombreux clins d'œil; mais à la différence de ceux qui tendent à figer les grands hommes en un faire-valoir national, Sergio Ramírez préfère considérer l'être de chair et de faiblesses.

Et il se divertit, comme dans les deux cas précédents, à prendre le contre-pied de surnoms élogieux devenant, sous sa plume corrosive, pure ironie. Ainsi le Gran Panida se trouve-t-il «diminué» en une petite statue abandonnée aux intempéries. Le Príncipe de los cisnes15 est certes sacralisé dans son pays: «tantos devotos que se apretujan a su alrededor porque quieren palparlo, tocar su ropa, besar sus manos»; mais il n'en demeure pas moins refusé d'audience par le président Zelaya en raison de sa réputation d'ivrogne invétéré. C'est en effet le portrait d'un Rubén Darío imbibé -«esponja embebida en ajenjo»- que brosse Sergio Ramírez, un poète «oliendo a alcohol», «abotagado» avec un «vientre hidrópico»16, peut-être rendu impuissant, dans ce pays d'eunuques, par ses excès éthyliques qui le condamnent à une cirrhose fatale (et véridique). Si l'alcool est pour une bonne part la cause de la disgrâce physique du poète, elle apparaît en outre comme la conséquence de sa neurasthénie et de son irrémédiable timidité: «El cisne bebía por timidez. Un ser inseguro, atormentado»17. Fort de cette corrélation avérée, le roman présente un Rubén Darío timoré et excentrique, libidineux et capable de déroger à toute bienséance.

Ce poète adulé est de surcroît sans le sou, «un príncipe que siempre le debía al sastre», toujours en attente de l'argent qu'on lui doit, le «príncipe viajero» devenant «un pobretón que debe viajar con pasaje de segunda clase», et ce en dépit des responsabilités diplomatiques qui l'honorent. Prince déchu à bien des égards, le Rubén Darío de Sergio Ramírez n'est pourtant guère plus inélégant que celui des biographes: le romancier présente ce personnage humain, trop humain, dans une perspective peut-être plus humoristique que satirique, confiant d'ailleurs au poète les répliques les plus acérées face à Debayle, l'association implicite Somoza-«chancho», et l'animalisation du géant du nord.

On n'omettra pas enfin l'histoire rocambolesque de l'imposant cerveau de Darío qui finit dans une urne, telle une méduse que tentent de s'arracher le beau-frère du poète et le Docteur Debayle jusqu'à ce qu'elle se brise et que des «marines» alertés par les cris récupèrent «that damned thing!»18. L'urne dérobée par Quirón sera confiée à La Caimana, sbire de Somoza et teneuse de bordel: «la urna reposaba en una palangana de baños de asiento sobre el mueble más preciado del burdel, un canapé de talladuras fúnebres que semejaba una góndola», puis elle finira dans la cour où l'on enterrait autrefois les fœtus de grossesses honteuses, sous la protection de cette «[...] espía de Somoza, sepulturera del cerebro más portentoso de todos los siglos!»19.

Simultanéité des contraires parmi tant d'autres qui peut rappeler que le roman juxtapose dès les premières pages l'apothéose de Rubén Darío et les immondices ou le porc en rapprochant le retour de l'idole en 1907 et «al otro lado de la calle enlodada por las lluvias donde los cerdos buscan desperdicios, aguarda [...] el tren expreso» dont un wagon est mis à la disposition du poète20: faut-il en déduire que pour Sergio Ramírez toute gloire avilit et n'est pas très éloignée de la décadence, ou que Darío se trouve terni du fait d'un contexte national dont il patît, en l'occurrence ce pays de pourceaux et d'ordures pouvant illustrer de façon percutante la répugnance de la dictature et la déchéance dans laquelle elle fait sombrer le pays? De la même façon, lorsqu'il est précisé que ce poète fut adoré comme un saint sans que les Nicaraguayens n'aient seulement lu ses poésies, un personnage affirme: «Un país de analfabetos no se preocupa de poesía»21 comme si là encore le contexte national desservait l'éclat du poète.

Corruption et ignorance constituent ici les maux de ce petit pays blessé dans sa dignité, bafouant le talent et l'intelligence: Darío, cet enfant du pays qui s'oppose à Debayle et à l'hégémonie nord-américaine se trouve mutilé par le docteur ami des États-Unis, symbolisant peut-être ainsi l'identité nationale meurtrie. C'est ce que peut suggérer l'opération tragico-burlesque du poète, victime de la démythification perpétrée par cet autre mutilateur, d'une certaine manière, que représente Sergio Ramírez: l'icône abîmée de Darío ne recèle-t-elle pas la mort des mythes nationaux dans une Histoire viciée par la présence des porcs?



Dans ce roman insolent, deux figures épiques empruntées à l'Histoire n'ont pourtant pas à subir les retouches satiriques de l'auteur, mais elles n'en voient pas moins leur mythe ébranlé. Si Sandino possède des «testículos descomunales [...] enormes y sonrosados como la postura del ave fénix»22, et réussit à bouter hors du pays l'ingérent yankee, il est finalement mis à mort par Somoza. Quant à Rigoberto López Pérez qui, dans une parodie du mythe, paraît faire renaître des cendres la virilité surdimensionnée du nationaliste rebelle, il sera castré, tout comme les autres conjurés atrocement torturés, après avoir tiré sur Somoza. Ainsi donc, le phallus symbolique de pouvoir et de régénération est-il définitivement arraché, renvoyant le pays à l'impuissance et la nécrose, ce pays d'eunuques où même le Juste «que se eche los huevos al hombro»23 finit par les perdre.

Renommé dans le roman Bienvenido Granda tel un sauveur méritant cette grandeur refusée à d'autres, Rigoberto est amputé de sa virilité qui ira flotter dans un flacon d'alcool comme le cerveau du poète, chacun rappelant une méduse et chacun dérobé par l'étrange Quirón. Le prodigieux encéphale de Darío aussi hypertrophié que le sexe de Sandino, connaît donc le même sort que le membre de Rigoberto, un personnage qui souhaite protéger l'identité nicaraguayenne: ce rebelle et poète conjugue action et écriture pour libérer le pays et préserver le souvenir de Rubén Darío.

Mais Rigoberto n'est pas l'unique exemple de la mémoire humiliée. Cet hagiographe puise certaines informations auprès de Quirón qui, lors d'un acte télépathique, s'est vu transmettre le numen par le poète. Il figure dans le célèbre poème de Darío «El Coloquio de los Centauros» de Prosas Profanas24. Or, le fils spirituel de Darío, «nació en la caseta de un excusado: qué suerte más trágica para el más docto de los centauros nacer en la mierda», remarque un conspirateur2526. Le protégé du grand poète lui-même n'est pas épargné par la souillure et le grotesque qui éclabousse quasiment tous les personnages.

D'autre part, cet héritier en un sens de Darío est pourtant muet (depuis les représailles des «marines» et l'intervention de Debayle), et s'il sauve l'urne contenant le cerveau du poète, c'est pour le remettre dans un lupanar puis un cimetière de foetus: avortement de toute renaissance d'un Nicaragua voué à l'oubli? Probablement car si Quirón dérobe aussi le flacon où repose la virilité de Rigoberto, les derniers mots du roman sont néanmoins: «los rudos cascos golpeando contra el empedrado, los lomos sudorosos, hacia el prostíbulo desierto, hacia la fuente de noche y de olvido, hacia la nada». L'espoir d'une régénération et les mythes nationaux sont réduits à ce néant qu'évoquent, dans une atmosphère fantastique, les trois derniers substantifs du roman. Est-ce à dire que le petit pays est définitivement condamné à la perte de créativité et de courage?

Comment recevoir ce dénouement ambivalent? Car si le message ultime n'est pas dénué de pessimisme, les éléments loufoques nous rappellent que le roman se veut d'abord divertissement: en effet, nous sommes conviés au théâtre dans cette fiction dont le final peut illustrer un baisser de rideau après le spectacle.

«¿Acaso es teatro?» s'offusque un Rigoberto dont un personnage considère la réécriture de l'Histoire en des termes propres au théâtre27. C'est pourtant bien ainsi qu'est présentée au lecteur cette histoire: outre que certains dialogues sont disposés comme des extraits de pièces de théâtre assortis de didascalies, la séquence-phare de l'attentat contre Somoza se produit dans le Teatro González et ce le jour où doit avoir lieu la première représentation d'une pièce au Teatro Darío: deux scènes, entre drame et comédie confondues par la présence de Rigoberto devant dire dans l'une «Buenas noches, padrecito», et envoyant en effet ad patres le père de la nation dans l'autre28. D'autre part, la «Casa Prío», café où se trouve la «mesa maldita» et coulisses où se trame l'action, représente une loge de laquelle un lecteur spectateur observe certaines scènes, en plongée directe sur la diégèse, pour ainsi dire, par le truchement du capitaine Prío: «desde su atalaya, aun sin catalejo: podía abarcar una vista completa de la Plaza Jérez»29. Le lecteur bénéficie également du regard d'un narrateur dont les apartés en forme impérative incitent à le suivre: «acudamos a Rigoberto» ou «acérquense conmigo»30.

Mais au-delà de l'Histoire, la scène éclairée par Sergio Ramírez devient une sorte de vaste théâtre de la comédie humaine: le theatrum mundi qui fait de l'existence une représentation jouée par un homme acteur31 amené tôt ou tard à tirer sa révérence puisque le narrateur nous invite à partager le regard de celles qui président à la destinée des hommes: «vean a las hermanas reírse», ces trois sœurs n'étant autres que les Parques -«costureras remendonas»32- qui renvoient à l'insignifiance un homme régi par des forces arbitraires supérieures à lui, ce sur quoi renchérissent les allusions prophétiques à la planète Mars puisque le 21 septembre 1956, date de l'assassinat de Somoza, la planète rouge de la guerre et des grands hommes sera au plus près de la terre, répètent les intrigants: «Marte nos es propicio y la voluntad suprema del Gran Arquitecto podría manifestarse»33. Cela dit, l'auteur, fidèle à la démythification qui traverse son œuvre, égratigne pareillement la sagesse des Anciens dans une scène où le drame humain est absorbé par le burlesque: ces Parques facétieuses et écervelées qui se jouent des tours, «equivocan los hilos»34. Une fois de plus, le romancier mêle le tragique de la mort à la plus légère fantaisie: pour mieux souligner l'absurde de toute existence -et partant le ridicule de tout homme- dont il vaut mieux se rire pour ne pas devenir fou?

Dans cette fiction goguenarde, la satire, et plus amplement l'humour, permet de prendre du recul face au drame de l'action comme de l'existence. Le comique n'entame en rien la capacité du roman à soulever un problème angoissant ou délicat comme le démontre, après tant d'autres, Margarita, está linda la mar dont les traits satiriques qui démythifient les hommes les plus prestigieux, à l'instar d'Aristophane malmenant Socrate dans Les Nuées, révèlent la mort des mythes nationaux nicaraguayens et paraissent suggérer la synonymie mythification-mystification. Embellir, c'est mentir, et idéaliser s'abuser. Nul ne mérite d'être auréolé, et toute gloire corrompt ou est rattrapée par la mort: triste conclusion de la désillusion sandiniste? Sans doute, car l'épigraphe extraite de Les Oiseaux résonne en elle-même de l'échec des utopies politiques qui ne font que substituer un tyran à un autre, vision du pouvoir dans son essence qui fascine Sergio Ramírez. Cet auteur, autrefois sandiniste actif puis vice-président du gouvernement révolutionnaire avant de fonder le Movimiento de Renovación Sandinista, s'il distingue la création littéraire de l'engagement politique, et entend ne pas se soumettre à la vérité de l'Histoire, ne saurait cependant faire totalement abstraction du contexte et des leçons qu'elle a pu représenter pour lui. Et cet écrivain de la théâtraliser dans ses romans comme pour mieux la dé-dramatiser.



Après la débâcle du sandinisme, Sergio Ramírez paraît préférer à l'amertume un détachement joyeux, ce mécanisme de défense qui s'apparente à «une anesthésie momentanée du coeur» pour parler comme Henri Bergson définissant le rire35. Se réfugiant peut-être en littérature après les blessures du combat politique, cet auteur badin témoigne, dans cet ouvrage a priori léger et accueillant la bouffonerie, d'une approche plus honnête des prétendus grands hommes envisagés pour ce qu'ils sont et non plus comme on voudrait qu'ils soient. Démonstration de compassion au cœur même des descriptions mordantes?

Ainsi nous trouverions-nous devant une satire indulgente, si l'on ose écrire, comme une maturité acquise sur le tombeau du mythe, mais sans se proposer nécessairement cette visée axiologique qu'on lui attribue bien souvent. Car rien n'indique, dans les éléments satiriques de Margarita, está linda la mar, un dessein réformateur -sauf à dire que désigner le malaise contient en soi une invitation à chercher le remède. Esquisser un Nicaragua tronqué et sali, fourbir ses armes contre toute forme de mythe, satiriser enfin tout mortel, c'est peut-être déjà en appeler à une vision plus humaine et sereine. Changer le regard. Et par lui le monde?





 
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